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 "one day, you freeze time, and out the window, you see a girl moving around"

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Agent Brice

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MessageSujet: "one day, you freeze time, and out the window, you see a girl moving around"   "one day, you freeze time, and out the window, you see a girl moving around" EmptyMar 17 Mai - 15:17

La vieille en face d’Owen s’arrêta d’un coup de mâcher bruyamment son chewing-gum. Il ne pensait même pas qu’une personne âgée puisse mâcher des chewing-gums avec une telle efficacité. Il la fixait depuis cinq minutes, fasciné par cette mastication intempestive, s’attendant presque à voir un dentier tomber de la bouche ridée de la femme. Il aurait sincèrement préféré que ça arrive. Tout plutôt que cette vision plongeante sur la bouche tordue, ouverte dans une grimace ridicule, la langue en train de faire un mouvement bizarre, la mâchoire de travers et des petits fils de bave tendus comme des rayons infrarouges dans la bouche de la vieille.
- Putain …
Owen n’avait jamais été spécialement poli. Pas qu’il soit mal élevé. Les injures et grognements faisaient juste partie de son mode de communication. Heureusement –ou malheureusement, tout dépendait des points de vue-, il n’avait ici personne pour l’entendre, personne pour voir sa grimace de dégoût et son mépris pour le troisième âge. Il voulait crever avant de devenir comme ça, momie vivante, personne attendant juste la mort à chaque coin de rue.
Il se leva bruyamment, tapa dans la jambe d’un homme –celui qui lui avait foutu son coude dans les côtes au dernier tournant du bus- et força l’ouverture de la porte. Il devait descendre dans trois stations, mais ne sachant pas quand est-ce que tout allait fonctionner de nouveau, il préféra continuer à pieds. Normalement, il ne sautait pas des bus lancés à pleine vitesse sur le boulevard de la ville. Normalement, le temps ne s’arrêtait pas subitement. Normalement, le monde ne s’arrêtait pas de tourner d’un coup.
Il était le seul à encore pouvoir bouger. Le seul à observer les postures étranges et les expressions figées. Le seul à se demander si rester pendant cinq, dix, vingt minutes dans une position inconfortable était douloureux quand le temps reprenait sa course ou si les personnes ne s'apercevaient de rien. Le seul à avoir subi ça pour la première fois en étant bourré et à avoir cru qu'il hallucinait, au point de dessiner des choses obscènes sur les têtes des passants en rentrant d'une soirée trop arrosée. Le seul qui s'était cru fou et le seul aussi qui avait tenté de voler une caissière. Le seul qui s'était approprié une montre parce qu'il la trouvait jolie, le seul à prendre des photos bizarres avec les portables des gens avant de les remettre dans leur poche. Le seul à changer leurs affaires de place, le seul à disparaître d'un coup quand le temps redevenait fluide.
Etre le seul, c'était à chier. Pas de gens avec qui rire, faire des conneries. Pas de gens avec qui partager l'expérience. Il avait tenté d'en parler avec un ami.
Dude, t'as plané haut cette fois.
Owen avait rigolé, d'un rire vide et froid. Son pote avait cru à une blague. Owen s'était cru maudit. Comme si on se foutait de lui. Comme si quelqu'un voulait le punir des cookies qu'il volait aux petits CP quand il était en CM2. Ou des fois où il avait mal parlé à sa mère. Ou de son arrêt de l'école.
Avec le recul, il se trouvait con d'avoir pensé ça. Il ne croyait pas aux dieux, en Dieu, à quelque chose de plus grand et plus parfait que l'Homme. Ca voudrait dire que cette chose serait aussi plus destructrice, car mieux que personne, l'Homme sait détruire et Owen ne voulait pas croire en ça.
Il ne savait, au fond de lui, s'il voulait savoir l'origine de cet arrêt du temps. Si c'était un homme, sur-homme. Un dieu. C'était ça qu'il craignait le plus au fond, que toutes ses certitudes soient détruites sauvagement. Son peu de certitudes à vrai dire, sur quoi son monde reposait. Beaucoup étaient déjà parties en fumé la première fois –ou plutôt la deuxième, quand il était sobre et avait décuvé- que ça avait commencé.
Lui voulait juste trouver quelqu'un pour l'accompagner dans cette merde. Dans ce temps qui ne passait pas. Des fois, c'était rapide, juste le temps (haha) de prendre une décision. Des fois, c'était long au point qu'Owen désespérait de voir la vie repartir. Il avait peur de voir le monde se figer à jamais, peur de ne jamais vieillir et de devoir se suicider pour échapper à une éternité de solitude.

Il descendit du bus et frissonna. Il n'arrivait pas à se faire à cette vision de fin du monde. Au début, il s'était senti terrifié et puissant devant toutes les scènes immobiles qui s'offraient à sa vue. Mais il ne contrôlait rien et très vite, la joie et la peur avaient cédé la place à du mécontentement et de l'angoisse -plus d'une fois, les crises de panique l'avaient laissé transpirant et presque aux bords des larmes sur un trottoir mal entretenu. Ça ne servait à rien, ce temps gelé, s'il était seul. Il avait désespérément besoin de compagnie.
Alors il cherchait quelqu’un, quelque chose qui bouge encore. Au hasard, dans les rues de la ville. C’était idiot et improbable, il en avait conscience. Comme si sur les sept milliards d’individus que comptaient la Terre, s’il n’était pas le seul à pouvoir encore pouvoir bouger, une autre personne serait dans cette ville. Mais l’espoir fait vivre et il n’avait plus rien de mieux à faire, une fois les conneries les plus prévisibles faites depuis longtemps.
Il passa devant la vitrine d’une boulangerie, mais ne rencontra aucun reflet. Son ombre ne le suivait pas non plus, comme si la lumière elle-même ne pouvant plus progresser. Comme si ce qui faisait ça pouvait bloquer l’univers entier. Il aurait dû voir un jeune homme aux cheveux bleus et aux racines noirs. Parce qu’il avait la flemme de se refaire une teinture et que sa mère trouvait les produits trop chers. Un polo vert, une chevalière en argent qui n’avait rien de gravé dessus et une boucle d’oreille qu’il s’était fait à dix-sept ans, parce que sa mère trouvait que ça faisait « gay ». Ce qu’il était précisément et il emmerdait profondément sa mère.
Il reprit sa marche, guettant sans vraiment le faire –comme s’il savait que rien ne bougerait- des signes de vie. De vraies vies.
Ne pas savoir combien de temps durerait cette torture l'angoissait plus qu'il ne l'aurait avoué. Il marchait, mais il ne cherchait surtout pas à mettre une durée sur cette action, car il n'y en avait pas. Il s'était vite aperçu qu'essayer de déterminer combien de temps était censé passer était désespérant et ennuyeux. Alors il attendait que ça passe. Que ça passe vite et que ça continue en même temps, pour pouvoir trouver quelqu'un, n'importe qui. Même la vieille avec son chewing-gum aurait fait l'affaire.
Mais ça ne venait pas. Et ça le rendait dingue, tous ces gens immobiles.
Il se sentait stupide à ne rien faire de cette situation à part attendre -et au début avoir fait les quatre-cent coups dans sa solitude. Faire des conneries quand on est sûr de ne pas se faire choper, ce n'était ni drôle ni divertissant. Il aurait pu cambrioler des magasins, des banques, des bijouteries ? Il aurait pu rentrer dans des endroits interdits et faire des choses bêtes comme courir sur l'autoroute. Il aurait pu crever les pneus des flics, mais il n'avait personne avec qui partager tout ça, alors il ne faisait rien. Et quand il avait essayé de filmer la scène pour montrer aux autres qu'il n'était pas fou, son portable refusait de déclencher la caméra.

Un mouvement, beaucoup plus loin sur l'avenue. Il se figea, crut avoir halluciner et plissa les yeux -myopie oblige. Le mouvement reprit et il pressa le pas, les mains dans les poches, déjà barricadé dans son attitude méfiante et passive-agressive. Il ne pouvait pas louper ça, il fallait qu'il arrive avant que ça disparaisse et qu'il ne s'aperçoive que ce n'était qu'une illusion de sa conscience en manque de compagnie.
Il arriva sur un parc, au carrefour avec une autre rue et ce qu'il vit le soulagea comme jamais. Heureux et soulagé, il l'était, mais aussi bien embêté. C'était un être humain, bonne nouvelle. C'était un être humain, mauvaise nouvelle. Ça impliquait qu'il fallait l'aborder, lui parler et surtout, ne pas le faire fuir.


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MessageSujet: Re: "one day, you freeze time, and out the window, you see a girl moving around"   "one day, you freeze time, and out the window, you see a girl moving around" EmptyMar 17 Mai - 17:11

Quand Parker baissa les yeux sur son portable, le contenu de son compte en banque avait changé. L'appareil vibra deux fois, affichant un message. « LE RESTE A RECEPTION DE L'ITEM. 0830PM DEMAIN. MÊME LOCATION. » Clair, concis. Son client se prenait probablement pour un mafieux ou un de ces gangsters de séries télévisées. Il répondit avec un emoji représentant un pouce levé, et rangea son portable dans sa poche. Bon. Il se trouvait devant une banque, débattant mentalement. Café en premier, cambriolage ensuite ? Ou l'inverse ? Un moment de réflexion lui apprit que le manque de café était trop important pour qu'il l'ignore. Il s'engouffra dans le Starbucks situé plus bas dans la rue, en ressortant avec un Caramel Macchiato Glacé à la main, la paille entre les lèvres et il ne la relâcha que lorsqu'il ressentit la douleur provoquée par le froid de la glace, juste au-dessus de son œil gauche. Aoutch. En attendant le sucre et le café lui donnaient déjà un regain d'énergie non négligeable. Au travail, Millstone. Il lâcha le gobelet vide dans une poubelle à l'entrée de la banque, et s'engouffra entre les portes, adressant un sourire charmeur au type de la sécurité. La réponse fut un regard noir. Les gens de la ville savent vous faire vous sentir chez vous. Parker éprouvait encore moins de remords à l'idée de voler le foutu tableau stocké à la banque. Son regard se promena sur l'intégralité du hall de la banque, avant de se focaliser sur les portes automatiques par lesquels les banquiers emmenaient leurs clients. Il avait besoin qu'elles restent ouvertes. Mesdames et messieurs, dans cinq, quatre, trois, deux, un... Parker cligna des yeux, et juste comme ça, le monde s'arrêta. Parker passa en mode travail – ce qu'il assimilait pas mal au mode avion de son téléphone : zéro distraction, et aucune de ses utilités premières. Il traversa le hall en trente-sept secondes, estimant pendant ce temps la durée de sa mission. Six minutes. Cinq et demi, s'il renonçait à voler un cupcake à la femme de l'accueil. Il passa les portes automatiques figées, grandes ouvertes, et évita de cogner dans le sac à main d'une banquière sur laquelle il garda les yeux un moment. Jolie. Les plans des lieux en tête, Parker avança rapidement dans les couloirs, avant d'atteindre la pièce recherchée. Quatre minutes restantes. Il était devenu doué à compter les secondes, puisqu'elles n'existaient pas dans les moments hors du temps. Parce que les banques sont parfois prétentieuses et trop sûres d'elles en matière de sécurité, elles négligent généralement la sécurité de leurs pièces de stockage – parce que selon elles, personne ne peut arriver jusque là sans être arrêté. Naïves. Insérant la clé dans la serrure toute simple de la porte, Parker entra dans la pièce. Allée B, container 56D, item #019. Le tableau était plus petit qu'il le pensait. Il pouvait le tenir d'une main. Deux minutes restantes. Parker fit demi-tour, prenant soin de laisser la clé sur la porte de la pièce de stockage, et atteignit le hall après s'être emparé d'un cupcake. Cinq minutes et demi et un cupcake. Bien joué, Millstone. Il ouvrit le coffre de sa voiture de location, fourra le tableau dedans, et le referma. Pas question qu'il remette le monde en route avant d'avoir mangé son cupcake. Il fit un détour par le Starbucks pour voler un Frappuccino, y versa deux sachets de sucre, et reprit son chemin. Il aimait bien le calme des moments gelés. Au départ, c'était un plan de secours, une option pour disparaître ou fuir si besoin. La solution pour voler pour manger. Les choses ont changées. Aujourd'hui, c'est un job, et on le dit le meilleur sans connaître son secret. Forcément.

S'emparant d'une paire de lunettes de soleil sur le nez d'un touriste qui lève les yeux dans une expression très étrange, Parker les planta sur son nez. Sa vision se colora soudainement de violet, et il fronça les sourcils. Pourquoi les fabriquants de lunettes faisaient-ils ça ? Le ciel ressemblait à une barbe à papa super compact. Ce qui était peut être une bonne raison pour fabriquer de telles lunettes. Mh. A noter. Il remit la paille de son gobelet dans sa bouche, maintenant habitué au froid. Compte rendu de la mission : exécutée en cinq minutes et demi – bonus cupcake – et aucun dégât à constater. Personne ne souçonnera la voiture de location, il l'avait garée à des centaines de mètres, et elle était là depuis le matin-même. Les enquêteurs chercheront du mouvement. Amateurs. Certains avaient reconnu sa façon de fonctionner, pourtant. Sur les rapports, on le traitait parfois de fantôme, ou on le croyait tout droit sorti de la CIA. Inutile de dire que c'était satisfaisant. C'était parfois frustrant de ne pas pouvoir se pointer sous leur nez pour qu'ils réalisent qu'un type de vingt-deux ans avait une réputation mondiale. La CIA avait essayé de le recruter deux fois, pour le piéger, demandant à ce qu'il vole pour eux. Il avait accepté les deux fois, et leur avait même déposé l'item demandé sans qu'ils ne parviennent à poser les yeux sur lui. C'était jouer avec le feu, mais rien n'est vraiment dangereux quand rien ne bouge.
Sur cette pensée, il sirota bruyamment la fin de son frappuccino. Et capta du mouvement du coin du regard. Parker se figea. Quoi? Le mouvement était impossible, quand le temps était gelé. Parker envoya balader la logique du mode travail, sourcils froncés et regard posé sur la silhouette qui, en effet, était en mouvement. Le mouvement est possible quand le temps est gelé, apparemment. Mets toi à jour, mode travail, bordel.  Parker balança son gobelet vide dans une poubelle. Il aurait été simple de faire repartir le temps maintenant, de retourner tranquillement à la voiture pour emmener le tableau en lieu sûr. Le mouvement soudain et le retour du bruit aurait pu distraire le type dans le parc. S'il était resté en mode travail, il aurait probablement fait exactement ça. Rappuyer sur play, et disparaître en quelques secondes. Parker n'était pas en mode travail, et de ce fait, revint en mode complet. Evaluer la menace, suggéra quand même mollement une voix dans sa tête qui avait quand même une intonation proche du mode travail. Ouais, si tu veux appeler ça comme ça. Son cupcake entamé à la main, Parker s'approcha de l'inconnu. « C'est ouf, nan ? » lança-t-il en désignant les alentours. Les gens immobiles. Les avions figés dans le ciel. L'heure qui n'existait plus. « Moi, ça me calme. » Parker ne donna aucun signe qui indiquait qu'il était responsable. Evaluer la menace, avait pensé le mode travail. Ecouter le mode travail était généralement une bonne décision. « Cool, tes cheveux. » ajouta Parker après une seconde, avant de mordre dans son cupcake, la bouche soudainement trop pleine de glaçage bleu électrique pour parler. Tant mieux.

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MessageSujet: Re: "one day, you freeze time, and out the window, you see a girl moving around"   "one day, you freeze time, and out the window, you see a girl moving around" EmptyDim 22 Mai - 19:23

Owen aimait très peu les conventions sociales qui consistaient à rajouter beaucoup de paroles superflues dans les échanges au point de les rendre vides. Mais il devait avouer que là, il aurait aimé que le jeune homme en face de lui rajoute beaucoup plus de superflu. Parce qu’il ne savait pas quoi dire, pas quoi répondre. Il ne savait pas s’il devait s’avancer ou rester là, s’il devait se présenter et poser des questions ou faire « comme si de rien n’était ». La dernière possibilité lui paraissait la plus improbable. Faire comme si tout était normal, faire comme si le temps n’était pas arrêté et faire comme s’ils étaient tous les deux parfaitement normaux ? Très peu pour lui. Par principe, Owen ne faisait pas « comme si ». Pour faire chier le monde aussi et rendre les gens mal à l’aise, mais c’était une autre histoire.

Owen nota que l’homme était un peu plus grand que lui, qu’il avait commencé à manger un cupcake –ça y ressemblait en tout cas- et que ses cheveux étaient résolument … Normaux. Owen nota tout ce qu’il pouvait noter. Parce que cet homme était sa seule chance de compagnie et qu’il n’avait aucune envie de se retrouver seul encore une fois. Parce qu’il fallait pouvoir le retrouver. Dit comme ça, il avait l’air d’un psychopathe, mais aux dernières nouvelles, le mec n’était pas dans sa tête. Heureusement d’ailleurs, il aurait sans doute été noyé entre la joie profonde et enfantine de trouver quelqu’un, l’espoir de s’en faire un ami ? Allié ? Whatever ? et la peur sourde de perdre cette unique chance qu’il entrevoyait chez cet inconnu. La chance d’échapper à l’angoisse, l’ennui, la monotonie et peut-être même, qui sait, sur le long terme, à la folie. Owen ne se voyait pas vivre comme ça toute sa vie. Il ne voulait pas passer toute sa vie à attendre le prochain arrêt du temps avec peur, à devoir attendre, attendre, attendre toujours que ça passe pour pouvoir recommencer à vivre en faisant comme s’il ne se passait rien.
Analyse. Analyse ce qu’il dit et réponds sinon il va te prendre pour un taré.
Si ce n’était pas déjà fait … C'est ouf, nan ?
Possibilité numéro un : répondre par l’affirmatif. Aller dans son sens, le cerner. Problème : il n’était pas d’accord et toujours pas principe, Owen n’aimait pas dire qu’il était d’accord avec un truc qui le dérangeait surtout quand le « truc » était l’arrêt brutal du temps, ce qu’Owen ne faisait pas rentrer dans les petites choses anodines de la vie, comme renverser son café ou se prendre son savon sur le gros orteil.
Possibilité numéro deux : dire non. Problème : le mec allait très certainement le prendre pour un rabat-joie asocial, se dire qu’il avait l’air chiant et le lâcher dans ce parc, avec sa solitude pour seule compagnie, ses idées noires en tête et la connaissance que quelqu’un était dans la même merde que lui, mais qu’il avait anéanti ses chances d’être apprécié avec un seul mot.
Owen haussa les épaules (réponse intermédiaire qui n’impliquait qu’une seule chose : que le type le prenne pour un muet).
Moi, ça me calme. Dans une conversation normale et s’il n’avait pas laissé de longues secondes passer, Owen aurait eu un sourire cynique et dubitatif. Le sourire qui veut « ça te calme ? Tu te fous de moi ? ». Mais trop de temps était passé et s’il souriait maintenant, il aurait l’air d’un attardé mental.

Owen se dit avec amertume qu’il ne s’était jamais autant soucié du regard de l’autre et que c’était bien la dernière fois que ça arrivait. Trop de choses à prendre en compte pour un résultat qui n’était même pas garanti. Trop de choses à ne pas se permettre de faire juste pour bien se faire bien voir. Trop de choses qui allaient contre toute sa philosophie.
Cool, tes cheveux.
Il se passa une main dans les fameux cheveux. Il aimait bien leur couleur d’un bleu presque électrique, leur longueur qui lui permettait de les ébouriffer sans qu’il n’ait à se coiffer pendant dix minutes chaque matin.
- Merci.
Oww, premières paroles qui montraient assurément toute son intelligence.
Bravo Owen, tu vends vraiment du rêve là …
Il laissa retomber sa main contre son flanc, mais elle revint rapidement se cacher dans la poche centrale de son sweat.
Son regard dériva quelques secondes sur le parc, comme pour chercher un élément de réponse dans le décor, mais ses yeux bleus se reposèrent bien vite sur l’inconnu, comme si le quitter des yeux plus de quelques secondes allait lui permettre de s’échapper et de disparaitre et avec lui, toute sa joie, son espoir et sa peur.
- Je trouve pas ça apaisant. Angoissant, ouais. Mais ça a arrêté d’être … intéressant quand j’ai réalisé que j’étais le seul à encore pouvoir bouger.
Micro silence. Ne laisse pas le silence s’installer. Une petite voix lui souffla de se présenter, mais il n’avait aucune envie de le faire avant l’autre, comme si révéler son identité était une faiblesse ou une arme que l’autre pourrait utiliser à son avantage. Il pouvait toujours mentir, mais il ne savait pas le faire. Regarder les gens dans les yeux et leur débiter des mensonges sur lui-même était quelque fois qu’il était bien incapable de faire. Quant à sa tenue, ses cheveux, son regard méfiant et rude, ils en disaient plus long sur lui que bien des mots. Le temps ne permettait pas de se mettre en manches courtes, mais s’il n’avait pas abordé son sweat vert, les bras d’Owen auraient révélés quelques tatouages perdus sur l’océan blanc de sa peau, ce qui encore une fois, aurait trahi toutes les conneries qu’il aurait pu balancer.
Le mec avait lancé des phrases badines et un peu … inutiles (tout ça l’était totalement aux yeux d’Owen vu la situation), il pouvait toujours faire pareil … N’ayant pas l’habitude de parler pour raconter tout et n’importe quoi, il essayait désespérément de trouver quelque chose à dire, n’importe quoi du moment que ça permettait d’éviter ce put*** de silence qui menaçait de s’imposer et qui angoissait Owen plus qu’il ne l’aurait avoué. Normalement, les silences, les vides des conversations, c’était son domaine, là où il excellait, mais à ce moment, il se sentait comme un gamin timide devant une classe où il devait se présenter. Normalement, c’était lui qui gênait les gens, pas l’inverse.
Salut, je m’appelle Owen, j’ai dix-neuf ans, j’étudie le droit, mais clairement, ça me casse les couilles et je fais tout pour faire chier ma mère.
C’était sa vie et elle était plutôt bien résumée, ce qu’Owen trouva un peu triste. Résumer sa vie à une phrase était le signe parfait pour montrer à quel point elle était vide. Même avec le temps qui s’arrêtait, même avec cette particularité qui le rendait encore maître de ses mouvements, sa vie était vide. Même avec les fêtes, les sorties, les conneries entre amis, les études, les devoirs mal faits, les disputes avec sa mère, il s’ennuyait et se demandait souvent ce qu’il faisait là. Ce type avait peut-être la réponse à ses questions.
- Ça a pas l'air de te faire flipper ...
Entre "avoir l'air" et "être", il y avait un monde dont Owen avait parfaitement conscience.
Ses yeux se posèrent sur le gâteau que l'autre mangeait. OK, il profitait lui au moins.


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MessageSujet: Re: "one day, you freeze time, and out the window, you see a girl moving around"   "one day, you freeze time, and out the window, you see a girl moving around" EmptyMer 25 Mai - 19:54

Le type ne répondait pas. Parker se demanda un instant s'il était parvenu à geler ses cordes vocales et pas le reste. Ce serait con. Il laissa le silence retomber alors qu'il finissait son cupcake. Avec le reste de la ville – ou du monde, il n'avait jamais vraiment testé les étendues de ce qu'il surnommait comme son bonus – endormie, le silence était lourd. Les premières fois, celles où il gelait le temps par accident et n'avait aucune idée de comment le redémarrer, Parker passait parfois des jours dans le silence. La nuit, ses oreilles bourdonnaient et il avait l'impression qu'on lui compressait le crâne. Il lui était arrivé de parler tout seul ou de chanter, la voix rauque de ne pas s'arrêter, juste pour s'assurer qu'il ne devenait pas sourd. Et le temps redémarrait, et il donnait l'air d'avoir passé six jours sans dormir et enfermé dans une cage, ce qui était vrai mais ne l'était pas non plus, parce que ce temps-là n'existait pas et qu'il était le seul à savoir passer entre les griffes du temps. Il avait appris à s'y habituer. Avait volé ces boîtes à musiques où de minuscules lames de fer créaient une mélodie en frottant le cylindre de métal parsemé de points en relief, comme si la mélodie était écrite en braille. Il avait passé plusieurs heures à regarder différentes villes figées en faisant tourner la petite manivelle, l'air de la vie en rose changeant de rythme lorsqu'il ne faisait pas attention. Aujourd'hui, Parker pouvait geler le temps autant qu'il le voulait. L'arrêter quand il le voulait. Le silence était toujours là, parfois insupportable – la boîte à musique était dans son sac, toujours – et là... Il inspira. Rien que le son de sa respiration le détendit. « Merci. » Parker manqua de sursauter, parce qu'il était parvenu à oublier la présence de l'inconnu. Pour sa défense, il n'avait jamais été habitué à la présence de personnes mobiles lorsqu'il travaillait. Roulant le papier de son cupcake en une boule le plus petit possible, Parker haussa une épaule distraite. Il remarqua brièvement que la couleur des yeux de l'inconnu s'accordait à celle de ses cheveux. Cool. Lui, s'il faisait la même chose, se retrouverait avec des cheveux d'un espèce de marron-vert horrible. C'était joli pour des yeux. Pas pour des cheveux.
« Je trouve pas ça apaisant. Angoissant, ouais. Mais ça a arrêté d’être … intéressant quand j’ai réalisé que j’étais le seul à encore pouvoir bouger. » Parker se mordit la lèvre pour s'empêcher de faire une remarque. C'était tout l'intérêt, bon sang, il en avait fait son job. Après, il se doutait bien que l'inconnu aurait plus de mal à se la jouer voleur invisible comme lui. Parker avait la possibilité de décider quand, et combien de temps. Pas lui. Il pouvait tout de même penser à plusieurs raisons de profiter de l'immobilité du monde entier. Il se retint de mentionner la fois où il était entré dans le bureau ovale juste parce qu'il pouvait. Il lança la boule de papier en direction d'une poubelle. Elle s'écrasa quelque part entre une poussette et un banc. Mh. « On s'y habitue, j'imagine. » finit-il par répondre, pesant ses mots mais les prononçant avec la même légèreté que précédemment. « C'est toujours terrible quand ça arrive dans des moments imprévus, ceci dit. » Ou du moins, il l'imaginait. Si d'autres personnes étaient insensibles à son don, il s'excusait d'avance pour les moments où c'était arrivé au beau milieu d'un repas, au sommet d'un grand huit ou en plein moment d'intimité tard le soir. Il adressa un sourire amusé à l'inconnu. « Mais je comprends le côté angoissant. J'ai du mal avec le silence, aussi, c'est... pesant. » Inutile de mentir à ce sujet, après tout. L'autre aussi avait dû en faire les frais à un moment ou un autre, au même titre que lui. Peut-être qu'ils pourraient s'échanger des techniques. Peut-être que l'inconnu était un de ces types de la CIA qui essayaient de le coincer. Peut-être qu'il deviendrait un allié. La vie était pleine de surprises, après tout.

« Ca a pas l'air de te faire flipper... » Parker releva les lunettes de soleil volées pour les poser sur le sommet de sa tête, et désigna le parc entier, la ville. Même les oiseaux étaient immobiles dans le ciel, arrêtés en plein mouvement, et pourtant toujours dans les airs. La gravité n'existait plus vraiment pour ce qui était gelé. Parker se demanda distraitement si la nourriture avalée pendant ce temps comptait aussi. Ca expliquerait peut être le fait qu'il soit maigre comme un clou. « J'ai vite pigé que quand y'a rien qui bouge, y'a rien à craindre. » Une pause, puis il ajouta, parce que le mode travail aurait fait exactement ça. « Et puis, c'est pas comme si on y pouvait quelque chose. » Il fourra un des galons de sa veste dans sa bouche, et jeta un œil autour de lui. S'il restait avec le type plus longtemps, il allait devoir dégeler le temps en sa présence à un moment ou un autre. Et jouer l'innocent. Il avait un tableau à ramener, de l'argent à encaisser, et un avion pour Taiwan à attraper pour son prochain travail. Mais il avait tout le temps – ah –   du monde pour ça. Peut-être pouvait-il cuisiner un minimum le type pour savoir s'il était de la CIA, un innocent ou un futur atout. « Bon, comme aucun de nous n'a rien de prévu jusqu'à ce que tout redevienne normal, ça te dit de manger une glace ? » Il avait envie de glace à la pastèque depuis des jours. Peut-être que l'inconnu aimait les glaces. Ou peut être pas. Il irait manger sa glace tout seul, et reprendrait sa voiture et son tableau. « Ah, j't'ai pas dit, je m'appelle Park. » Park. C'était comme ça que ses camarades de lycée l'appelaient, avant qu'il ne devienne bizarre et fasciné par le temps et par sa condition toute découverte. Incapable d'expliquer pourquoi aux autres, il était devenu cet adolescent renfermé dans des livres de science d'un niveau bien trop élevé pour sa classe, et personne ne lui avait vraiment plus parlé. Aujourd'hui, c'était juste Malia et Aaron qui l'appelaient Park, mais c'était surtout lorsqu'ils avaient quelque chose de terrible à annoncer. Mais il était hors de question qu'il donne son nom complet – même si une recherche google mènerait probablement à un compte facebook innocent débordant de photos de soirées, de chambres d'hôtel avec vue sur la mer et de photos ridicules de Malia et Aaron qui s'embarrassaient tous seuls. « Enfin j'te force pas, hein. » ajouta-t-il après une seconde. « Pour la glace, pas pour l'utilisation de mon prénom. Je suis juste content que ma chance ne m'ait pas lâché, j'aurais pu me retrouver avec un tueur en série et là, j'étais dans la merde. » Pas vraiment, mais bon. Aaron lui disait souvent que sa façon de mentir était maladive, automatique, qu'il ne se contrôlait même pas. Aaron avait sans doute raison.
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MessageSujet: Re: "one day, you freeze time, and out the window, you see a girl moving around"   "one day, you freeze time, and out the window, you see a girl moving around" EmptyJeu 2 Juin - 17:56

-On s'y habitue, j'imagine.
« On » n’avait jamais inclus Owen dans quoi que ce soit. Ni son entourage, ni lui-même ne voulait qu’il soit englobé dans ce « on » qui devait le faire appartenir à un groupe, qui devait lui donner une identité en commun avec des gens. Owen n’avait jamais été très porté sur les relations fusionnelles ni mêmes les relations amicales éclatantes de fraternité. Non pas qu’il n’aime pas les gens, juste qu’il était incapable de montrer ses sentiments d’affection autrement qu’avec un comportement lointain voire agressif. Comportement qu’il adoptait avec tout le monde. Ceux qu’il n’aimait pas avaient juste le droit à un niveau d’agressivité complètement différent que ses amis. « Amis » : personne qui la ferme quand tu fais des choses connes. C’était à peu près sa définition de l’amitié à quelques détails près …
Owen fit un vague mouvement des épaules, qui voulait autant dire « oui » que « non ». Il ne prenait pas trop de risques avec ça. Il avait cruellement conscience de ses silences, mais étaient incapable de trouver quoi que ce soit à dire pour les meubler : tout sonnait faux dans sa tête, vide et hypocrite. Il l’était souvent, comme tout le monde (l’une des seules choses qu’il avait en commun avec une large part de la population sans que ça le gêne). Il s’agissait plus d’un code social, une chose que l’on fait pour s’éviter les ennuis et embrouilles inutiles et fatigantes. Il ne disait pas à quelqu’un qu’il n’aimait pas d’aller se faire foutre, convention sociale qu’il respectait parce que ça lui évitait d’avoir à parler à la fameuse personne. Moins par volonté de bien se fondre dans la masse que d’éviter de se faire chier à parler finalement.
- C'est toujours terrible quand ça arrive dans des moments imprévus, ceci dit.
Owen sourit, amusé. Il aurait sincèrement aimé (et c’était bien la première fois) que son sourire découvre ses dents, qu’une lueur franche de joie s’allume dans ses yeux et qu’il trouve une bonne blague pas trop conne à sortir, mais ce ne fut pas le cas. Il eut un sourire en coin et si une lueur s’alluma, ce fut celle de l’ironie et du cynisme. Sa blague, il la retint, parce qu’il n’était pas sûr que le gars en face avec son innocent cupcake l’apprécie. Il ne donnait pas une bonne impression, ce n’était pas le moment de lui en sortir une bonne sur la fois où il était en train de draguer quelqu’un et que le temps s’était immobilisé. De toutes manières, ça ne regardait que lui, étaler aux yeux de tous ses hontes, ce n’était pas son délire.
- Mais je comprends le côté angoissant. J'ai du mal avec le silence, aussi, c'est... pesant.
- La solitude me gêne beaucoup plus que le silence.
Un aveu, il l’avait appris très tôt, ce n’était jamais bon. C’était se dévoiler, avouer ses faiblesses et compter sur la confiance de l’autre pour ne pas en profiter. Pourtant, il n’avait pas réfléchi avant de parler, la phrase était sortie avec empressement et naturel, sans qu’il n’ait le temps de se demander s’il faisait bien de le dire. Après tout, l’autre l’avait fait et ça ne l’engageait à rien … Se cacher n’allait pas l’aider à ne pas faire fuir le gars et s’il voulait paraitre encore plus asocial qu’il n’en avait l’air (et qu’il était), il ne pouvait pas mieux faire que de ne continuer à ne rien dire. Parler était une bonne chose. Une bonne chose. Il essayait de s’en convaincre, parce que si c’était bien, ce n’était pas facile.

- J'ai vite pigé que quand y'a rien qui bouge, y'a rien à craindre. Et puis, c'est pas comme si on y pouvait quelque chose.
Il y avait eu une pause entre les deux phrases qu’Owen ne s’était pas empressé de combler. Nouveau haussement d’épaules.
- C’est pas ça qui me fait … peur (il hésita sur le mot, pas certain de vouloir l’employer). Être seul et subir ça toute ma vie, ça, ça me dérange.
Il n’ajouta rien pour le côté fataliste de la situation que l’inconnu avait parfaitement souligné, parce qu’il avait raison, même s’il n’appréciait pas cette impuissance passive.
On a l’air beau dans ce parc à discuter pendant que le temps traine.
Il avait imaginé et fantasmé cette rencontre avec tous les sexes, tous les âges, toutes les origines, tous les lieux possibles et imaginables, mais il n’avait pas pensé qu’ils s’arrêteraient juste et parleraient, comme de vieux amis qui se retrouvent après des années de silence.
- Bon, comme aucun de nous n'a rien de prévu jusqu'à ce que tout redevienne normal, ça te dit de manger une glace ? Ah, j't'ai pas dit, je m'appelle Park.
- Owen.
- Enfin j'te force pas, hein. Pour la glace, pas pour l'utilisation de mon prénom. Je suis juste content que ma chance ne m'ait pas lâché, j'aurais pu me retrouver avec un tueur en série et là, j'étais dans la merde.
- OK pour la glace. Y en a plus loin, je sais pas ce qu’elles valent.
Pas de « c’est moi qui paye » puisqu’ils savaient tous les deux qu’ils n’allaient pas les payer. Owen évitaient de payer quand le temps était normal, alors quand tout partait de travers …
Il se passa de nouveau une main dans les cheveux, chassant les mèches bleutés de son front. Sa main revint dans la poche de son sweat rapidement.
- Un tueur en série ? (mince sourire ironique) Je suis tombé sur un éternel optimiste dis donc.
Un silence d’un quart de seconde.
- Le karma aurait quelque chose de très gros à te reprocher ...
Il ne savait pas lui-même si c’était une question ou une affirmation.

Il amorça un mouvement prudent et presque timide vers la direction du quartier marchand où se trouvaient la plupart des vendeurs de glaces et sucreries qu'Owen avaient pillés avec ses amis bien des années plus tôt, quand tout était encore normal et que le risque de se faire attraper les motivait, les faisait rire et au fond, les faisait agir. Aujourd'hui, rien ne motivait Owen à faire quelque chose dans ce monde figé. De l'argent, il aurait pu en obtenir, mais le dépenser n'aurait pas été possible. Mère et potes, tous savaient qu'Owen ne vivait pas « bien » et que par conséquent, se payer une BMW, n'était pas dans ses moyens. Partir à l'autre bout du monde, tout plaquer après s'être fait un maximum d'argent, il y avait pensé, mais même ça, ça ne l'avait pas motivé : et après ? Abandonner les études de droit qu'il avait durement commencées, abandonner tout ce qui pouvait lui rapporter ce qu'il méritait vraiment, ce qui serait un argent réel et qu'il pourrait exhiber avec arrogance et fierté, il n'en avait aucune envie. C'était la seule chose qui lui appartenait de droit, qu'il ne devait qu'à lui-même et personne d'autre, cette mince réussite malgré toutes les conneries qu'il avait faites. Le droit, il s'en foutait, seul le résultat comptait. Et ses cheveux bleus, ses tatouages et son regard sec, tout son être montrait qu'il n'était pas là pour devenir avocat ou pour aider qui que ce soit.
- T'as parlé de ta chance … Elle te sourit souvent ?
Il était curieux de connaître la réponse et mise à part cette figure de style qui sonnait faux dans sa bouche, il trouvait que c'était une bonne manière de nouer le dialogue autrement que par un « tu fais quoi dans la vie ? » ou un « t'habites où ? » dont il se foutait bien et qui auraient donné à la conversation un sujet faux, un dialogue qu'il n'aurait pas envie de tenir.

Ils arrivèrent devant un stand et Owen décida qu'il prendrait sa glace ici. L'autre pouvait choisir d'aller « chez Francis au pays de la glace » s'il le voulait.
Owen n'avait jamais fait de glace de sa vie et quand il ouvrit la vitre côté marchant après avoir poussé de côté Micheline (c'était le nom du stand, il avait donc décidé que la femme s'appellerait Micheline (et ça collait bien à son âge)), il se sentit un peu bête.
- Tu sais faire des boules ?  
Au pire, il pouvait toujours faire des petits copeaux lamentables, mais ça claquerait moins.
Il empoigna la cuillère à glace et fit claquer la languette qui chassait les boules (de glace) plusieurs fois, un petit sourire aux lèvres. La perspective de manger une glace framboise, chocolat, melon avec supplément chantilly dans le maxi cornet le détendit.
- Je pensais pas manger une glace pour ma première rencontre avec quelqu'un, comme ça.
Il désigna de la cuillère à glace le paysage figé, appuyé contre le rebord du stand, absolument pas préoccupé par la pollution qu'engendrait cette vitre ouverte sur un congelo. Si son ombre n'était pas foutu de le suivre, pourquoi le froid pourrait se faire la malle ?
- Je pensais être le seul à pouvoir bouger en fait.
Il haussa encore les épaules, comme pour rendre ses propos plus anodins et leur faire perdre leur valeur personnelle.
- Je suis content (Owen prit soin de ne pas dire « heureux ») de voir que c’est pas le cas.
Voilà qui faisait beaucoup de paroles de sa part.
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